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Les contours de l’incidence professionnelle définis par la cour de cassation

La nomenclature Dintilhac précise que l’incidence professionnelle « a pour objet d’indemniser non la perte de revenus liée à l’invalidité permanente de la victime, mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle, ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu’elle exerçait avant le dommage au profit d’une autre qu’elle a dû choisir en raison de la survenance de son handicap. »

Les évolutions jurisprudentielles permettant de mieux définir les contours de ce poste préjudice sont nombreuses.

  • Cumul de l’incidence professionnelle et de la perte de gains professionnels future possible

La Cour de cassation a récemment rappelé que le cumul avec perte de gains professionnels futurs possible et de l’incidence professionnelle était compatible (dévalorisation sur le marché du travail et pénibilité lors des périodes travaillées (Civ. 2e, 6 février 2020, n°19- 12.779).

En effet, la Cour de cassation a rappelé que l’incidence professionnelle a vocation à indemniser la « dévalorisation de la victime sur le marché de l’emploi, l’abandon de sa profession […] et la précarisation de sa situation professionnelle » en sus de l’indemnisation d’une perte de gains professionnels futurs partielle (Civ. 2 , 18 avril 2019, n°18-15.08)

La Cour de cassation a confirmé sa position un mois plus tard en jugeant que l’incidence professionnelle peut indemniser la perte de carrière en plus des pertes de gains professionnels futurs (Civ 2, 23 mai 2019, n°18-17.560, Publié au bulletin).

En effet, la haute Cour juge que les pertes de gains professionnels futurs sont calculées à partir du dernier revenu de la victime avant l’accident.

Dès lors, elles ne prennent pas en compte la progression des revenus liée à l’ancienneté du salarié, ni la promotion professionnelle que la victime aurait pu obtenir dans les années à venir.

Même dans l’hypothèse où la victime est indemnisée de ses pertes de revenus futurs sur la base d’une rente viagère, cette dernière ne prend pas en compte l’évolution de carrière et de revenus à laquelle la victime pouvait prétendre.

  • Une indemnisation in abstracto mais non forfaitaire

Par ailleurs, la Haute Juridiction énonce que la réparation de l’incidence professionnelle ne saurait être appréciée de manière forfaitaire (Civ. 2 , 13/06/2019, N°18-17571).

Cet arrêt fait directement référence à une méthodologie aujourd’hui régulièrement appliquée par les Juges du fond permettant la détermination de l’incidence professionnelle au regard de l’évaluation par le prix du travail par laquelle il s’agit de déterminer par un pourcentage du salaire mensuel le coefficient d’incidence professionnelle subi par la victime.

La problématique de la détermination de l’incidence professionnelle et son indemnisation à sa juste valeur est d’autant plus intéressante que le contexte récent de crise sanitaire a mis en exergue que la valorisation par le travail est essentielle car elle permet à chacun de se sentir utile à la société.

Ainsi, la notion « d’anomalie sociale » mise en exergue par la Cour de Cassation de par l’inaptitude à l’emploi prend aujourd’hui d’autant plus de sens (Crim, 28 mai 2019, n°18- 81.035).