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La notion de tierce personne

La notion de tierce personne ne se limite pas à l’aide nécessaire aux besoins vitaux de la victime mais peut également inclure à l’aide nécessaire pour l’entretien du jardin

L’indemnisation et la notion de tierce personne : seul le besoin de la victime compte !

Pour rejeter la demande présentée par une victime au titre de l’aide par une tierce personne, une Cour d’appel avait énoncé que la demande relative à l’entretien du jardin n’était pas recevable dès lors que le recours à cette assistance est destiné aux personnes dans l’incapacité d’accomplir seules les actes essentiels de la vie courante relatifs à l’alimentation, le lever, le coucher, la toilette, l’habillage et les déplacements à l’intérieur du logement.

La Haute Cour juge : « En statuant ainsi, alors que le poste de préjudice lié à l’assistance par une tierce personne ne se limite pas aux seuls besoins vitaux de la victime, mais indemnise sa perte d’autonomie la mettant dans l’obligation de recourir à un tiers pour l’assister dans l’ensemble des actes de la vie quotidienne y compris, le cas échéant, l’entretien de son jardin, la cour d’appel a violé le texte et le principe susvisés. »

Un rappel nécessaire pour les juges du fond, médecins et experts, qui trop souvent limitent l’évaluation de ce poste aux actes essentiels de la vie.

En effet, le principe de réparation intégrale impose de replacer la victime dans la position qui aurait été la sienne en l’absence d’accident.

Il en découle que poste de préjudice ne se limite pas aux seuls besoins vitaux de la victime mais peut indemniser l’aide pour les tâches ménagères ou domestiques, l’accompagnement pour tous les déplacements lorsque la victime ne peut pas conduire, l’aide pour la guidance d’une victime cérébrolésée ayant un défaut d’initiative, l’aide pour les tâches administratives pour les victimes ayant des séquelles neurocognitives induisant une grande fatigabilité, l’aide pour le seul port de charges lourdes du fait de séquelles orthopédiques la limitant ou encore donc l’aide pour l’entretien du jardin.

Il est important de rappeler que la Haute Cour puise ces notions dans les racines mêmes du droit du dommage corporel : le principe de réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ainsi que le principe de non mitigation.

Par un arrêt en date du 15 décembre 2022 (pouvoir n°21-16.712), elle avait ainsi rappelé que la réparation du dommage doit être intégrale, sans perte ni profit pour aucune des parties et la victime ne peut être tenue à aucune obligation de minimiser son préjudice et avait censuré une cour d’appel à ce titre qui avait limiter l’indemnisation d’une victime au titre de l’aide d’une tierce personne à une moyenne de 20 heures par an aux motifs que, s’agissant des courses, « leur fréquence peut être augmentée pour fractionner le port des charges lourdes et réduire le temps de présence debout dans les rayons ; et désormais, la prestation de livraison à domicile est proposée par de très nombreux professionnels, y compris de l’alimentaire ».

Elle avait ainsi jugé que la cour d’appel, qui avait imposé à la victime une obligation de minimiser son préjudice, avait violé le principe le principe de non-mitigation sus-visé. S’agissant en outre de l’évaluation du besoin, il convient également de rappeler que Cour de Cassation considère que : « Le montant de l’indemnisation a lieu au titre de l’assistance tierce personne ne saurait être réduit en cas d’assistance familiale ni subordonnée à la justification de dépenses effectives », cassant ainsi un arrêt de Cour d’Appel pour avoir jugé que la victime
n’avait pas à supporter les charges sociales pour l’emploi d’un salarié compte tenu de l’aide familiale reçue. (Civ. 2e, 13/09/2018 n°17-22.427)

Des rappels nécessaires pour les juges du fonds, médecins et experts qui, trop souvent limitent l’indemnisation de ce poste aux actes essentiels de la vie et réduisent le nombre d’heures allouées au prétexte que la victime n’a pas réellement eu un recours à tierce personne alors que seul besoin compte.

Civ 2, 25 mai 2023 n°21-24.825 –
https://www.courdecassation.fr/decision/646eff2d3fdabad0f888e7bc